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Fiscalité des concessions de brevet

Alors que dans le régime antérieur, les revenus tirés de l’actif éligible étaient imposés à un taux réduit sans déduction des dépenses de recherche, il faut dorénavant s’intéresser au résultat net de la concession, de la sous-concession ou de la cession d’actifs incorporels, c’est-à-dire aux revenus acquis au cours de l’exercice après déduction des dépenses de R&D qui se rattachent directement à ces actifs et « qui sont réalisées directement ou indirectement par l’entreprise ». Le rapport de l’assemblé nationale indique que « ces dépenses peuvent avoir été engagées [..] indirectement à travers des entreprises liées » ce qui mériterait toutefois quelques précisions.

Pour que la plus-value de cession de l’actif puisse bénéficier du régime de faveur il faudra (comme c’était le cas sous l’empire de l’article 39 terdecies du CGI) que l’actif ait été acquis depuis au moins deux ans et que l’entreprise cédante n’ait pas de liens de dépendance avec l’entreprise cessionnaire. Pour la sous-concession, le résultat net serait diminué des redevances versées par l’entreprise sous-concédante à la concédante, ce qui réduirait de facto l’assiette éligible au taux préférentiel.

Les actifs incorporels concernés par le taux réduit sont listés au I du nouvel article 238 du CGI. Il s’agirait des brevets, des certificats d’obtention végétale, des procédés de fabrication industriels et des logiciels protégés par un droit d’auteur (le texte initial visait les logiciels n’ayant pas déjà généré de revenus avant le 1er janvier 2019, mais cette restriction a été supprimée par l’Assemblée Nationale), ainsi que les inventions brevetables non brevetées, c’est-à-dire celles dont la brevetabilité serait certifiée par l’Inpi à l’occasion d’une procédure de demande de certificat d’utilité ou de brevet.

Les sénateurs ont précisé, avec le soutien du gouvernement, que l’éligibilité concerne les éléments présentant le caractère d’actifs incorporels immobilisés, même s’ils ne sont pas effectivement immobilisés à l’actif du bilan de l’entreprise.

Pour pouvoir bénéficier du taux réduit, l’entreprise devrait exercer une option pour chaque actif concerné, à n’importe quel moment de la vie de l’actif. Il est toutefois à noter que la révocation d’une option serait définitive.

Le texte prévoit que l’option pourrait porter non pas sur l’actif lui-même (par exemple une formule brevetée, un procédé…), mais plutôt sur (i) un bien ou service lorsque plusieurs actifs concourent à la production du dit bien ou service (par exemple plusieurs formules pour un médicament), ou (ii) une famille de biens ou de services (plusieurs médicaments qui utilisent des brevets identiques, ou un logiciel dont les versions successives sont regroupées dans une même famille de produits), en respectant un principe de cohérence des méthodes.

Cette souplesse avait été demandée par les entreprises dont les biens ou services comportent plusieurs actifs protégés rendant l’analyse actif par actif difficile à mettre en œuvre. L’intérêt d’une option par biens ou services (ou par famille de biens ou de services) devrait néanmoins s’apprécier à l’aune du mécanisme de cantonnement des déficits institué par la réforme : le déficit de concession d’un élément pour lequel l’entreprise a opté ne serait imputable que sur les résultats nets de concession du même élément réalisés au cours des exercices suivants.

Pour ajouter à la complexité – et si l’on comprend correctement le second alinéa du 1° du II de l’article 238 – il est prévu que s’agissant du premier exercice au titre duquel un résultat net positif est calculé, il convient d’opérer une « capture » des dépenses effectuées par l’entreprise en lien direct avec la création de l’actif incorporel au titre des exercices antérieurs. Cette capture consisterait à déduire du résultat net d’exploitation de l’actif le montant des dépenses engagées par l’entreprise depuis l’exercice au titre duquel elle a exercé l’option.

Outre la rédaction pour le moment très imprécise du texte sur ce point, il apparaît opportun que le législateur précise l’articulation entre cette règle de capture des dépenses antérieures et celle relative à l’imputation des déficits antérieurs afférents au dit actif.

Nicolas GERARDIN

Associé Droit fiscal

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